Mbappé, une mauvaise passe mais rien d’insurmontable…

Kylian Mbappé a toujours des statistiques intéressantes. Mais le football, ce n’est pas que des chiffres et il y aussi le contenu des matchs que vous proposez. L’idée n’est pas d’en rajouter une couche et de répéter ses erreurs, mais plutôt de comprendre comment il en est arrivé là et comment en sortir.

Il existe plusieurs raisons au fait que Mbappé ait pris de mauvaises habitudes sur le terrain. Jouer avec Neymar en est une première. Les footballeurs sont en concurrence sur presque tout : le salaire, le statut, l’image… Quand le français arrive au PSG, c’est un joueur efficace qui joue avec ses qualités. Normal, cela ne fait que six mois qu’il évolue dans l’élite.

Doucement mais sûrement, l’ancien monégasque va alors vouloir montrer que lui aussi sait dribbler, sait faire des exploits mais autrement que grâce à seule vitesse. C’est là que les entraîneurs et le club auraient dû le recadrer.

On l’a souvent répété, mais la force d’un joueur est de faire ce qu’il sait faire et non pas ce qu’il pense être capable de faire. Blaise Matuidi est un parfait exemple. S’il avait voulu faire du Motta ou du Verratti, il se serait raté. Le français s’est alors rendu indispensable en courant, en prenant la profondeur, en apportant ce que les deux autres milieux ne faisaient pas. Non seulement il est devenu intouchable, mais en plus il a progressé même dans son jeu offensif.

Plusieurs joueurs ont connu ces passages à vide

Quand un joueur se trompe, le coach doit le recadrer ce que n’ont su faire ni Emery ni Tuchel. Les exemples sont nombreux. Quand Ronaldo arrive à United, il multiplie les gestes inutiles, superficiels. Il est alors repris par Ferguson mais aussi par Roy Kean. Résultat ? Il va garder ce qui fait sa force et devenir un joueur plus efficace, plus compétiteur que showman. Ce fut la même pour Benzema au Real. Tancé par Mourinho, le français va rester le même beau joueur mais en progressant dans sa capacité à lire le jeu, à se faire mal pour devenir le joueur qu’il est aujourd’hui. D’ailleurs, en plus de réagir positivement aux propos de Mourinho, il a été aidé par Ronaldo dans sa préparation quotidienne, dans le sérieux aux entraînements. On pourrait ajouter Tanguy Ndombélé. À Tottenham, quand Mourinho arrive, il le malmène dans les médias pour lui faire passer le message qu’il est un très bon joueur mais qu’il n’a pas le bon comportement, la bonne attitude. Un an plus tard, le joueur est transformé.

À l’inverse, Ben Arfa avait montré un énorme potentiel lors de ses débuts à Lyon. Mais il a gâché son talent en se trompant d’objectif et en n’écoutant personne d’autre que son agent. Ce dernier, régulièrement, lui répétait que c’était un artiste, qu’il n’avait pas à défendre, qu’il était là pour faire la différence. Résultat ? Une carrière bien loin de ce qu’on lui promettait mais aussi que son talent aurait dû lui faire réaliser.

Le club l’a mis trop haut

Personne ne remet en cause le potentiel de Mbappé. Mais pour progresser, passer un cap, le club aurait dû aussi avoir une autre attitude.

À force de lui répéter qu’il était l’avenir, la future grande figure du club, en lui offrant près de 10M€ de salaire par an alors qu’il n’avait que 18 ans et six mois de haut niveau, il l’a mis bien trop haut. Imaginez-vous qu’on vous répète sans cesse, à 18 – 19 ans que vous le plus beau, le plus fort, qu’on vous offre un salaire mirobolant, comment se remettre en question, comment se dire qu’on doit encore progresser ? Tout cela en ayant remporté la coupe du monde si jeune.

Quand Trezeguet et Henry ont remporté la coupe du monde 1998 à 20 ans, ils sont retournés jouer quelques sélections en espoirs. À l’époque, cela avait beaucoup fait parler mais les deux joueurs racontent souvent que ce passage leur a permis de ne pas s’endormir sur ce titre, qu’il leur fallait encore travailler.

Rien d’irréversible

Mbappé est moins bien. Il y a la saison particulière, mais aussi ses blessures, son retour précipité pour jouer le Final 8 après son entorse, et le COVID-19 qu’il a attrapé en septembre.

S’il veut redevenir un joueur efficace, il doit revenir à des choses simples et s’appuyer sur ses forces, ce qu’il sait faire.

Par exemple, arrêter de demander le ballon dans les pieds alors que la profondeur et la vitesse font partie de ses forces. Arrêter de faire des passements de jambes inutiles qui polluent son jeu, et revenir à de l’efficacité, de la simplicité : je donne, je bouge, je demande le ballon en mouvement, je joue à une ou deux touches de balle.

Encore une fois, personne ne dit qu’il n’est pas capable de faire autre chose mais qu’aujourd’hui ce n’est pas possible. Mais il existe deux problèmes. Le premier, c’est qu’à force d’entendre qu’il n’est pas capable, on a parfois l’impression qu’il s’entête bêtement pour prouver que si, lui aussi sait faire cela.

Le second problème, c’est qu’il est en fin de contrat dans 18 mois. Si Pochettino décidait de le mettre sur le banc, il pourrait le prendre comme une provocation et décider de quitter le club, dans un an et demi, gratuitement. Ce serait une catastrophe économique pour le PSG. C’est peut-être illogique pour la majorité des suiveurs du football, mais c’est une réalité du football que personne ne peut nier.

Mbappé a réalisé des bons voire très bons matchs au PSG. Si on devait citer deux qui peuvent servir de référence, on pourrait citer le match face au Bayern (3-0) en 2017 dans lequel, sur chaque prise de balle, il attaquait la profondeur pour faire mal. On pourrait également citer le match aller à Manchester en 2019. Même s’il rata la balle de 0-3, il avait, dans cette rencontre, également pris une majorité de ballons avec l’intention de faire mal. Dans ses deux rencontres, rares furent les moments où il a demandé le ballon dans les pieds comme il le fait actuellement.

Oui, le laisser sur le terrain est une solution. Comme l’a déclaré Habib Beye sur Canal+, laissons-le enchaîner pour qu’il retrouve de la confiance. Paris l’a déjà fait avec Zlatan, avec Cavani, entre autres, dans des périodes où ils étaient moins bien. Sauf que les deux joueurs avaient plus de 28 ans. Mbappé en a 22 et le laisser sur le terrain, c’est aussi le conforter dans le fait que même moins bon, il est indispensable. Cela l’aide-t-il vraiment ?

Se remettre en question, c’est loin d’être une faiblesse. Mbappé a explosé très vite et il est logique qu’il ait une période de stagnation. L’objectif est alors qu’elle dure le moins longtemps possible mais aussi d’en sortir. Certains ont réussi, d’autres ont échoué. À lui de trouver le bon chemin.