Mbappé a raté sa finale. Même s’il a des circonstances atténuantes, même s’il est loin d’être le seul, il doit travailler là-dessus pour évoluer et grandir.
Quand il est entré contre l’Atalanta, couplé à la sortie de Papu Gomez, le match a basculé. Les Italiens ont reculé de vingt mètres et Paris a alors dominé complètement la fin de rencontre. Parce que Mbappé fait peur. Contre Leipzig, il n’a pas été flamboyant, mais il a aussi pesé dans la tête de Nagelsmann, le forçant à jouer plus bas que d’habitude.
Dimanche soir, c’était le Bayern. Prise à deux dès qu’il touchait le ballon, fermeture des espaces, pressing pour empêcher le PSG de trouver ses trois attaquants. Pourtant, il a réussi à se créer une énorme occasion, à la 44ème minute. Malheureusement, son geste ne va pas être assez précis, puissant, pour tromper Neuer.
Des ratés dans des gros matchs
Lors de la saison 2016-2017, Mbappé, c’était le petit nouveau, le petit jeune, la sensation de la campagne européenne de Monaco. Depuis, au PSG, il est attendu. Dans la très grande majorité des rencontres, notamment en ligue 1, il n’a pas besoin de forcer son talent pour marquer. Il n’a pas besoin, non plus, de progresser dans son intelligence de jeu, dans ses déplacements, pour faire la différence, sa vitesse suffit largement, la supériorité parisienne faisant le reste.
Mbappé n’a que 21 ans et une énorme marge de progression devant lui. Et si on est si exigeant avec lui, c’est au regard de son talent, mais aussi de ses déclarations. C’est lui qui a demandé à ne pas être jugé en fonction de son âge. C’est lui qui a demandé plus de responsabilité.
Contre le Real Madrid, en huitième de finale, il avait souffert face à Ramos, et son fameux dribble, feinte de partir à gauche, extérieur pied droit – accélération, n’avait jamais marché. Face à United, il avait manqué la balle de 0-3 à l’aller. Au retour, après avoir offert la passe décisive de l’égalisation, il avait manqué deux face à face dont un après une chute en pleine course. Dimanche soir, le Bayern l’a éteint. Il n’était sûrement pas au top après avoir manqué beaucoup de séances suite à sa blessure en finale de la Coupe de France, mais ça n’excuse pas tout.
Un jeu qui doit évoluer
Pour comprendre certaines choses, il faut sortir des chiffres. Mbappé marque beaucoup mais dans une équipe qui survole la Ligue 1. C’est déjà très bien, mais ce n’est, malheureusement, pas assez significatif.
Lors de la Coupe du monde, il avait fait très mal aux Argentins, qui avaient joué très très haut et avaient laissé le Français plonger dans leur dos. En quart, contre l’Uruguay, il avait souffert. En demi, face aux Belges, il avait souffert. En finale, son match ne fut pas bon, mais en inscrivant le 4ème but, la France étant championne du monde, beaucoup de gens ont oublié sa prestation.
Mbappé devient trop prévisible et comme il est désormais connu et reconnu, et même attendu et craint, les grandes équipes l’ont étudié et savent comment le prendre ou, en tout cas, l’empêcher de s’exprimer. Le problème, c’est que la Ligue 1 ne lui permettra jamais de passer ce cap de ne plus compter que sur sa vitesse.
Le champion du monde français doit progresser seul, en se forçant à trouver les bons déplacements, les moments où il doit percuter ou plutôt prendre des relais. Mais au PSG, il ne pourra le faire qu’en Ligue des champions, ou deux fois, contre Lyon, en championnat. Le reste du temps, il n’en aura pas besoin.
Il doit aussi devenir plus tueur devant le but. Il manque trop d’occasions, trop de face-à-face. Enfin, il doit gommer toutes ces extravagances, tous ces gestes inutiles pour montrer qu’il sait aussi faire des choses. Il doit vouloir faire mal. Romario a gagné une Coupe du monde avec des pointus. Il faut parfois être plus efficace que beau.
Personne ne dit que Mbappé est nul, surcoté. Personne ne dit que Mbappé n’est pas en avance par rapport à son âge. Mais s’il veut, comme il le dit, marquer l’histoire du foot, il doit évoluer dans sa compréhension du football. C’est le problème de ces joueurs aux qualités athlétiques hors normes. Dans les centres de formation, on les laisse faire, jouer sur leurs seules qualités, tout ça parce qu’ils font gagner les matchs et ça flatte l’ego des éducateurs en place. Sauf que c’est tout, sauf de la formation.
Encore une fois, Mbappé possède une belle qualité technique, ce n’est donc pas juste un joueur qui va vite. Mais il a trop profité de sa vitesse et aujourd’hui, pour passer un cap, progresser, il doit penser ses déplacements, son jeu sans ballon, et plus seulement accélérer en se disant : je vais semer tout le monde.
Si des Ben Arfa, des Menez, avaient des qualités énormes, mais qu’ils n’ont pas fait la carrière qu’ils auraient pu (ou du), c’est de leur faute évidemment, mais aussi celle de leurs formateurs. Benzema a quitté la France assez tôt, dans un très gros club, apprenant le travail très vite aux côtés des Ramos et Cristiano, et c’est aussi pour ça qu’il a fait cette carrière.
Mbappé doit se remettre en question, travailler sur ses quelques défauts. Ce n’est pas se renier, mais se donner les moyens de faire encore plus, encore mieux. Il a encore du temps devant lui, mais s’il veut en faire profiter le PSG, c’est maintenant.
