Le bal des faux-culs
Parce qu’ils ont notamment sifflé Messi et exprimé leur colère dimanche au Parc des Princes, les supporters du PSG sont devenus des parias aux yeux de certains observateurs du club parisien. Non, messieurs les hypocrites, siffler un septuple Ballon d’Or, symbole de toutes les erreurs de Doha, n’est pas un crime de lèse-majesté !
La mémoire est décidemment un drôle de brouillard. Une profonde amnésie qui ferait disparaitre six mois de critiques au prétexte d’insultes, de sifflets et de moqueries. Au lendemain d’un après-midi de révolte dans un Parc des Princes désabusé, une partie du monde du foot a trouvé son nouvel ennemi. Les supporters ! Ces ingrats, ces irrespectueux, ces consommateurs qu’on aimerait tant formater et qui ont commis l’impensable en sifflant la légende Messi et son copain Neymar.
Quel crédit peut-on donner à tous ces moralisateurs du dimanche ? A ces snipers télé qui fustigent depuis des mois ce PSG morose et sans idée ? Tout y est passé dans leurs journaux et sur leurs plateaux. Le marketing extrême du club au point d’en oublier ses couleurs. Les défaillances collectives d’un groupe davantage bâti pour vendre que gagner. Les carences structurelles éparpillées entre Paris et le Qatar. Ou encore les passe-droits pour des millionnaires capricieux qui pensent d’abord à leurs followers plutôt qu’à leurs supporters.
Consultants, journalistes, anciens joueurs, éditorialistes… Tous ont dégommé à raison ce PSG dont la force commerciale n’a d’équivalent que sa faiblesse mentale. Mais il ne fallait pas toucher à Messi, l’homme aux sept Ballons d’Or. Ne pas égratigner la légende, respecter l’histoire, se taire et admirer. Il ne fallait pas s’en prendre non plus à Neymar, l’homme aux sept fractures d’Or. Ne pas se moquer de sa transformation physique, ne pas ironiser sur son coup de rein envolé. Juste se taire et admirer.
Ne vous y trompez pas, c’est parce que les grands combats se mènent autour des symboles que Messi et Neymar ont été sifflés. Parce qu’ils représentent, plus que quiconque dans cet effectif fragile, les choix et les défaillances de Doha. Siffler Messi, ce n’est pas cracher sur l’un des plus grands joueurs de l’histoire et son glorieux passé. Non, siffler Messi, c’est lui rappeler l’engouement que son arrivée a suscité et la faible implication qu’il a proposée. Siffler Messi, c’est également défier une direction dépassée qui pense encore qu’une accumulation d’étoiles peut suffire pour tout gagner. Siffler Messi, c’est réclamer une cohérence sportive au lieu du tout marketing.
Comme la mémoire du dégoût sera toujours plus grande que la mémoire de la tendresse, il ne fallait pas s’attendre à un autre accueil pour Neymar. L’autre emblème de ce PSG mondialisé, qui se gargarise autant de ses succès que du nombre de ses abonnés. Neymar sifflé, qui peut vraiment s’en étonner ? Le chemin du roi n’est qu’une impasse, une route défoncée que plus personne ne semble pouvoir réparer. Ne restera que la sensation d’un gâchis démesuré, d’un mariage forcé qui n’aura finalement que trop duré, d’une ambition brièvement partagée.
Parce qu’une colère justifiée est toujours saine, il faut finalement saluer la fronde des supporters du PSG. Et surtout leur accorder le droit de s’exprimer. Le droit de ne pas aduler une légende barcelonaise fraichement arrivée. Le droit de ne plus soutenir un Brésilien qui n’offre plus rien. Le droit d’être fiers, même les lendemains de défaites. Le droit de ne plus soutenir Doha et ses choix mégalomanes. Le droit de ne plus se reconnaitre dans ce vestiaire fragilisé. Et le droit également de rappeler qu’un jour, le Camp Nou a aussi sifflé Messi.
Un article de Nicolas Puiravau pour Paris United.